Insertion survenue à Fant, retour à la réalité temporelle : ici
Il faisait jour. Un soleil pâle et haut dans le ciel dardait ses rayons tièdes sur une agréable plaine herbacée. Une atmosphère paisible, presque champêtre, qui exprimait la félicité d’un monde sans tourment. De ci, de là, des ruminants paissaient, nullement impressionnés par la troupe qui progressait à grande vitesse. Le silence des lieux était troublé par la respiration bruyante de leur monture et le martellement de leurs sabots. Les hautes montagnes qui se dessinaient dans le lointain se rapprochaient. Les deux nightmare et les deux chevaux de guerre lourdement équipés galopaient à vive allure.
Ils étaient pressés. Ils devaient atteindre leur objectif avant que « La Légère » ne s’éveille. Ils gagnèrent le défilé.
Suniel sauta à terre, le regard tourné vers la haute paroi. Les autres l’imitèrent.
« D’après nos informations, c’est ici qu’elle serait dissimulée ». Cet elfe gris de grande taille pour quelqu’un de sa race, au port altier et à la beauté quasi-divine, se tourna vers l’unique femme qui les accompagnait. Elle s’approcha de lui et le regarda avec tendresse. Il l’enlaça. C’était étrange. On attendait nullement une telle attitude de la part de cette femme. Son visage sévère et dur, ses longs cheveux blancs et ses yeux opalescents ne laissaient transparaître aucune tendresse. Si un doute subsistait, sa large épée runique levait toute incertitude. Et pourtant. C’est avec amour qu’elle posait son regard sur lui.
« Tu le sais, je te l’ai déjà expliqué à maintes reprises, lui disait-il, que cette affaire ne te concerne pas. Léa n’a rien à voir dans cette affaire. C’est usant à la fin. Cesse de te mesurer sans cesse avec Lehjdas… »
J’ai compris alors qu’il s’agissait de moi. Il continuait avec douceur mais fermeté. « Vous aurez d’autres occasion pour cela. Nous sommes réunis au sein du même Pentacle. Tu le sais pertinemment. C’est ainsi. Et c’est déjà extraordinaire que nous ayons de tels rapports tous les deux compte-tenu des circonstances… Ne rend pas les choses plus difficiles ». Une voix forte l’interrompit.
« C’est fini tous les deux ? » Celui qui venait de parler était un personnage d’une stature impressionnante. Une force de la nature. Il me dépassait d’une dizaine de centimètres. Son torse ressemblait à une barrique. Son visage sauvage était dévoré par une barbe vieille de plusieurs jours. Ses cheveux roux ébouriffés tombaient en cascade sur son armure de plaques. Il tenait d’une seule main un marteau de guerre d’une taille prodigieuse. Une détermination hors du commun sourdait de lui.
« Asumôl, tu nous attends ici avec les montures. Nous, nous montons ». Anticipant son geste, Suniel la retint. Elle se serait jetée sur lui sans son intervention. Le dénommé Idaûle se retourna vers la falaise qui osait se dresser face à lui et amorça l’ascension d’un pas résolu.
- « Où vas-tu exactement ? », m’entendis-je dire.
- « Je monte ». Ils gravirent la montagne.
- « Ne veux-tu pas que l’on t’aide à grimper ? », suggéra Suniel qui avait quitté avec regret la femme qui l’aimait.
- « Non ! »
- « Comme tu voudras. Je me demande si nous n’aurions pas dû courir le risque d’appeler Hadés et Nahliacie. On ne sait pas ce qui nous attend là-haut… ». A qui faisait-il allusion ?
Il ne leur fallut pas longtemps pour atteindre le surplomb. Une grande porte de pierre encastrée dans la paroi annonçait le début de leurs difficultés. Ils la défoncèrent. Ils repoussèrent deux statues de pierre façonnées à l’image de Toneciel. Ils débouchèrent sur une grande caverne naturelle presque circulaire d’environ trente mètres de diamètre et dix mètres de hauteur. Une fresque recouvrait l’intégralité des parois de la caverne. Des hommes et des femmes se dirigeaient en procession vers une butte surmontée d’un socle de pierre monumental de forme carrée. Une lanterne y était posée. Elle brillait de mille feux. Elle était dotée de cinq facettes de verre teinté. Des éclairs multicolores s’échappaient dans toutes les directions, illuminant la butte, la procession et, par un effet d’illusion, la caverne elle-même. Ces éclairs d’aspects et de nature forts différents altéraient l’environnement et contaminaient l’espace. On distinguait nettement la puissance de leurs impacts. La fulgurance de quatre de ses éclats relevaient des forces élémentaires, tandis que le le cinquième émettait une énergie pure aveuglante.
La caverne maintenant. Elle s’étageait en gradin. Deux marches de trois mètres de largeur et autant de profondeur faisaient le tour de la pièce. Une multitude de gemmes pointues incrustées dans la première, des dessins représentant des pentagrammes thaumaturgiques sur la seconde et enfin au fond, un liquide visqueux proche du mercure bouillonnait. Au centre de la caverne reposait un cercueil posé sur une plateforme de verre. Un elfe gris, que Djalesh reconnu comme celui qu’il venait d’apercevoir dans la tourmente en un temps et un lieu distinct de celui-ci, reposait allongé. Trois trônes de pierre étaient encastrés dans la paroi aux différents points cardinaux de la caverne. Deux ponts de pierre se croisant à angle droit pour dessiner une croix se rejoignaient au milieu de la plateforme. Enfin, suspendue par une fine chaînette argentée, une lanterne était accrochée au centre du plafond. Elle paraissait en tout point semblable à celle figurée sur la fresque à ceci près que nulle lumière ne s’en échappait.
A la vue de la lanterne, j’entendis Suniel s’exclamer : « le fou… il l’a éteinte. C’est la fin ».
Lorsque nous entrâmes sur le seuil de la caverne, l’elfe s’assit puis se leva, ses yeux de déments révulsés tournés vers nous. Il nous nargua, nous invectiva. Alors le combat commença… Je ne me souviens plus exactement du déroulement du combat. Cet adversaire était coriace et nous eûmes les plus grandes difficultés à nous en débarrasser. Cependant, je sais précisément que c’est moi qui portait le coup final. Alors…
Insertion 4 Scène Fant