La fuite des prisons d’ArtEclat

L’alliée du Roi Mâlâm se saisit d’eux, les soulève et les emporte vers la cache secrète. Ils traversent les murailles ; cavernes et couloirs défilent sous leurs pieds. Enfin, elle décrit un arc de cercle à 90° et les lâche sans ménagement. Ils s’écrasent sur un sol sablonneux qui brille de mille feux. Des lucioles aux yeux phosphorescents fendent l’air d’une large caverne. Ils ne sont pas tirés d’affaires car un siphon fiché dans le sable aspire et broie hommes et bêtes. Oubliant toute convenance, ces maudites engeances se ruent vers un étroit boyau qui s’échappe de la salle gloutonne. Une surprise les y attend. Le roi ne les a pas trompés. Une chambre, agréablement aménagée, havre de paix dans un univers carcéral, les accueille dans son nid douillet. Un arbre aux fruits nourriciers et récupérateurs suffira à leur bonheur. Les boissons déposées par un hôte invisible mais bienveillant ne sont pas de refus.

Après ce repos salvateur, ils découvrent par hasard l’antre du gardien. Une dizaine de braseros disposés le long des parois éclairent une vaste grotte circulaire d’où fuient deux tunnels tortueux ainsi qu’une cavité située à mi-hauteur. Du lichen aux couleurs maladives dégouline du plafond et se répand sur un sol tapissé d’objets divers calcinés, troués, corrodés ou écrabouillés. Au centre, une immense et obscure tâche d’une quinzaine de mètres de diamètres anéantit tout espoir de clarté. Le gardien loge ici.

Leur acolyte Liacinah s’y est prise à deux fois. La première fois, l’échec fut cuisant et elle reflua cahin-caha vaincue. La seconde fois se solda par une non moins cruelle déconvenue. Elle abandonna l’idée de dérober la lanterne au cerbère pugnace et s’engouffra dans le portail mystérieux. Ce dernier conduirait chez Dalamok, un domaine qui jouxte -ou jouxterait, on ne sait plus qui croire- le royaume des ombres qui n’a de cesse de se dérober. La voix de la sagesse susurre son doux murmure et les incite à suivre la jeune femme aux cheveux verts. Une autre voix, tentatrice et malveillante, les exhorte à emprunter le chemin de l’audace. Ils sont supérieurs en nombre et ils ne feront qu’une bouchée de ce gardien prétentieux et arrogant. Après tout… ils plongent. La nuit les enveloppe de ses bras funestes.

Une sphère difforme à la peau squameuse et craquelée flotte dans les airs. Six larges yeux mobiles de couleurs différentes les observent l’air goguenard. Une bouche aux dents pointues et effilées brasse l’air tandis qu’une douzaine d’appendices rétractiles se meuvent tout le long de ce corps obscène duquel dégouline du lichen purulent. Ces extensions se métamorphosent tour à tour, en rasoirs, pointes ou protubérances contondantes.

Ils auront fait illusion le temps d’une respiration. Une minute interminable, qui s’étire et qui n’en fini plus. C’est long une minute quand l’on subit les assauts d’une créature infernale, qui se démultiplie, qui crache, qui mord et qui jette des sorts à tout va. Ils bondissent hors du trou. La voix de la sagesse reprend le dessus… Oh, Monsieur le gardien, croyez bien qu’il y a erreur, nous divaguions, excusez ce moment d’égarement. Ils franchissent le portail.

Arrivée dans l’antre de Dalamok

Djalesh et Shade échouent dans un couloir souterrain éclairé par une lueur tamisée provenant d’une ouverture sur leur droite d’où provient de la musique. Où sont-ils ? Hier soir encore, ils se trouvaient dans la grotte en compagnie de Cinielle sur ArtEclat. Celle-ci devait convaincre Maïale d’infléchir le cours des actions à venir. N’ayant pas de réponses à ces questions, ils se dirigent vers la trouée qui s’ouvre sur une chambrette sobre. Une jeune femme vêtue d’une simple chemise de nuit blanche est assise sur un tabouret devant un clavecin. Ses doigts agiles courent le long du clavier. Sa tignasse verte retombe sur ses frêles épaules. Elle se retourne. Sa ressemblance avec leur compagnon Ailhiance est frappante.

Elle s’appelle Liacinah. Elle est l’intendante de Dalamok, le maître des lieux lequel ne peut les recevoir pour l’instant. Dalamok se montrera plus tard après, hem, une partie de chasse à l’homme qui ne fait guère de doutes quant à l’identité du gibier. Il se réveillera bientôt. Ce domaine reçoit très peu de visiteurs, c’est pourquoi Dalamok est honoré de votre présence.

Après un repos bien mérité, ils progressent dans ce domaine austère et vide. Leur entrée dans une grotte étrangement décorée sonne le réveil d’un territoire endormi. La température de l’air s’élève, une brume acide se propage des fissures et nappe le sol, des jets de vapeur, trop longtemps contenus, se déversent en furie sur les visiteurs malchanceux. Huit socles d’environ un mètre de diamètre sont disposés en cercle autour d’une mare sombre. Sur chacun de ces socles, figure un numéro en lettre d’or et une fente. Deux socles sont occupés par des statues en pierre représentant un homme et une femme aux traits tirés, harassés et effrayés. Sur les murs, des fresques colorées dépeignent des personnages qui brandissent une clé puis la glissent dans l’une des fentes des socles. A chaque nouvelle statue placée sur un socle, répondent des scènes de liesse des autres personnages. Plus loin, on aperçoit des aventuriers monter sur des socles vides. D’autres scènes, montrent des hommes et femmes accablés, prostrés devant des socles vides, les yeux rivés vers quelque chose qui semble les épouvanter.

Ils poursuivent leur progression… quand -est-ce la peur, la contrariété, l’agacement de se savoir poursuivis par quelqu’un qui se cache et qui joue avec leurs nerfs ?- leur pulsation s’accélère, leur cœur galope et bat la chamade au point que Djalesh perde connaissance et s’effondre sur le sol. Shade garde son calme et traîne son compagnon hors de la zone. Un rapide diagnostique révèle la gravité de la situation. Djalesh est mort. Un rope trick et un résurrection seront nécessaires pour raviver le prince-démon. Quelque soit la créature qui se dissimule derrière ce Dalamok, ses desseins sont clairs.

MF-Level 15/14-1