92 – Une formalité…

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Le combat contre la dizaine de morts qui les assaillent n’est qu’une formalité. Goules, wights et consorts jonchent le sol alors que d’autres disparaissent avalés sous une mare de boue. Shade, inflexible, a maintenu sa concentration durant toute la mêlée tandis que sa sœur et son frère massacraient leurs adversaires. La routine. Ils sont habitués. Shade aperçoit les contours d’une porte qui se profilent sur la paroi, puis les contours s’affermissent pour devenir porte. Ils la franchissent.

Une bizarrerie cette salle cubique de neuf mètres d’arête. Elle sonne faux, son ancrage interroge. Ses murs sont bariolés par une alternance de lignes verticales concaves sombres et de bandes convexes plus claires. Le sol et le plafond sont hérissés de piques et de concrétions de couleur laiteuse. Et… ils sont isolés, chacun dans cette même pièce, placés dans des contextes tous différents mais défavorables, un combat déloyal dont ils ont peu de chance de s’en sortir indemne. A chacun son purgatoire. Djalesh affronte un mind flayer surpuissant, Shade un démon type III agressif alors que la magie ne fonctionne pas et Ligeia lutte contre une monstruosité, un morkoth manipulateur. Résultats ? Djalesh décérébré, Shade déchiquetée et Ligeia liquéfiée. Une formalité, disait-on.

Illusion ? Cauchemar ? Qui pourrait le dire ? Ils apprendront par la suite que pour pénétrer dans l’espace suivant il faut mourir dignement. Un exercice difficile qui nécessite concentration, audace et acceptation de sa propre mort.

Ils se secouent et avancent. La porte s’ouvre sur un espace dont on ne sait s’il se trouve à l’extérieur ou à l’intérieur, un peu des deux sans doute. La partie visible dévoile une vaste plaine aux limites floues qui se perdent dans des nappes de brouillard. Le sol cendreux est parsemé de cavités et de bosses. En guise de plafond, un ciel bas, nuageux et lourd de menaces latentes pèse sur ceux qui osent s’introduire en ce lieu impie.

Un piédestal circulaire d’une vingtaine de mètres de diamètre et deux mètres de hauteur surplombe l’entrée de la salle. Une série de marches mène à une plateforme où un gnome des souterrains entièrement nu est écartelé entre deux piliers, ses pieds et mains attachés par de solides chaînes de métal. Le visage tuméfié, le corps balafré il dodeline de la tête, à peine conscient de son environnement. Auréolés d’une lumière bleuté, les piliers crépitent et émettent une odeur d’ozone tandis que trois squelettes intangibles enveloppés de bandages crasseux dansent autour de lui, tout en l’haranguant. Des apparitions. Des êtres sournois et vifs employés pour affaiblir mentalement, soutirer des informations et induire la peur.

Plus loin, ils aperçoivent une structure en pierre haute de six mètres, une sorte de dolmen, environnée d’une brume sombre et épaisse. Une forme ectoplasmique que l’on imagine humaine, décrit des cercles autour tout en poussant des cris stridents. Ils ont cru un instant qu’il s’agissait d’un maître-démon. Ils se trompent. Ce n’est que Briocht, la créature qu’ils recherchaient.

Une décharge d’énergie d’une rare violence les projette au sol. Les hostilités commencent. Comment raconter une bataille qui laissera des traces sur les plans physiques et moraux. Ces êtres d’une fatuité incroyable ont été ébranlés dans leurs certitudes.

Djalesh s’est échiné à frapper cette créature insaisissable, sans résultat notoire. Ni la magie, ni les coups n’ont semblé l’atteindre. Du vent. Il a brassé du vent. Briocht a absorbé une partie de son énergie vitale au point qu’il lui faudra du temps pour recouvrer ses forces. Son amour propre en a subi un coup. Il en sort dévasté. Shade a puisé dans sa magie la plus puissante pour contenir les assauts de cette furie et des apparitions. Elle a fini épuisée, vidée et … gelée. Ligeia n’a eu de cesse de frapper, frapper et frapper encore. Heureusement qu’ils ont découverts –certes tardivement– la faiblesse de Briocht qui tirait sa force du dolmen. La lame magique acérée de Shade et le marteau dévastateur de Ligeia ont eu raison de ce monument improbable, réceptacle d’un pouvoir surnaturel, fauchant par la même occasion une créature damnée qui ambitionnait à devenir reine.

Ils ont vaincu…… mais à quel prix ? Meurtris dans leur âme et leur chair, plus que jamais conscients de leurs incommensurables faiblesse et fragilité, encore abasourdis par la violence du choc, ils aspirent au repos, voire à l’hibernation. Alléluia !

2/11/2024