87 – Dans la faille

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Au cœur de la faille ! Le sort doit être lancé au plus près de la source d’énergie ! Shade et Maïjire enfourchent les unicornes d’ombres, ces sauvages destriers utilisés pour se déplacer sur le royaume des morts tandis que Djalesh invoque son nightmare. Annabelle l’accompagne. La faille du Sud-ouest s’étire sur une centaine de kilomètres de longueur. Selon le fouineur Mâal, une première anfractuosité de taille suffisamment importante pour que des hommes puissent s’y glisser, se trouve à quelques heures des remparts de la cité.

Après avoir déjoués une embûche d’une dizaine de nécrophidius, ils reprennent leur route. Les craquelures du sol s’accroissent, les turbulences aussi. Ils préfèrent abandonner leurs montures qui s’agitent de plus en plus. Le chaos règne aux abords du trou. Des langues de terre se chevauchent, des fissures béantes zèbrent le sol, les bourrasques de vent manquent de les renverser à tout moment, le tumulte obsédant les assomme. Ils sont contraints de se boucher les oreilles.

Soudain, un point lumineux coruscant jaillit dans les airs tel une fontaine écarlate. Un nain de feu à la longue chevelure léonine en émerge. Ses yeux blancs opalescents rayonnent de mille feux. Il semble aspirer et canaliser l’énergie des alentours. A croire qu’il s’en nourrit. Ils l’ont déjà rencontrés. Il s’agit d’un être de la Loi. Ce nain avait affronté un être du Chaos dans la cité de Gax. Leur affrontement avait ravagé la cité. Ballottés tels de vulgaires fétus de paille, ils entendent Annabelle s’époumoner afin de percer le fracas assourdissant : « Thrékélé… Fuyez, je vais tenter de le contenir ». Alors qu’ils s’engouffrent dans le trou béant qui les avale, ils ont le temps d’apercevoir le nain qui sourit les bras levés vers le ciel, l’hermésophon, faisant fi des avertissements de leur compagne, se jeter sur le nain de feu et dans une dernière vision fugace, d’entrevoir Annabelle entourée d’une demi-sphère multicolore élever un petit globe sombre plus noir que la nuit au-dessus d’elle. Malgré la cacophonie ambiante, ils parviennent à entendre la voix du nain lui répondre dans un éclat de rire. « Oui, Lame, qu’ils fuient, laissent les goûter aux breuvages de la solitaire que l’on s’amuse un peu ».

Le conduit étroit gagne une salle circulaire de faible dimension par son plafond. Cette salle correspond à celle décrite par le fouineur. Une clarté aveuglante, un liquide laiteux qui suinte du plafond et des parois, une herbe épaisse mouchetée de blanc. Ce liquide se solidifie au contact de leur peau. Diverses chatières disposées au sol, sur les côtés et au plafond, laissent imaginer l’étendu de la complexité des lieux. Ils se plongent dans un silence afin d’éviter ces bourdonnements agaçants, adoptent une forme semi-éthérée pour ne pas se pétrifier sur place et… maintenant, où aller ??? Comment s’orienter dans ce dédale de salles et conduits ? L’esquisse dessinée par les mages de Thalirie ne les aide pas. Il est impossible de s’y repérer. Par contre un Find the path pourrait se révéler utile.

Ils suivent la ligne tracée par le sort. Ils montent, ils descendent, déboulent dans une salle circulaire, montent à nouveau, redescendent… Quand donc cela cessera t-il ? Ils ont perdu tout sens de l’orientation et s’en remettent à la fiabilité du sort. Fasse le ciel qu’il ne les fourvoie pas ! Les flux énergétiques augmentent en intensité… signe qu’ils approchent de leur objectif. Un large trou d’environ six mètres de diamètre occupe le centre d’une pièce circulaire sans issue. Des rubans multicolores s’en échappent et lèchent les parois. Ils ont toute les peines du monde à conserver leur équilibre.

Shade amorce la lecture du parchemin censé les débarrasser du courant léthargique. Djalesh obstrue le couloir par lequel ils sont arrivés avec une succession de barrières infranchissables : un wall of iron, un prismatic wall, un nouveau wall of iron et, pour parachever son œuvre, un glyph. Rassuré, il attend leurs opposants de pied ferme. Ils ne mettent pas longtemps à arriver mais ils s’écrasent ou se désagrègent sans parvenir à les atteindre. Shade poursuit sa lecture. Sa voix s’élève, son débit s’accélère. Son corps est parcouru de soubresaut. Elle puise dans ses ressources physiques et s’affaiblit peu à peu mais rien ne saurait interrompre sa concentration.

Le trou rétrécit à vue d’œil. Il se rétracte, les lumières s’affolent, les forces s’agglomèrent autour d’un point de plus en plus petit. Shade achève l’incantation. La tension accumulée se libère en une violente déflagration.

Soufflés par un crash inévitable, leur être désincarné se meut dans l’espace et le temps, emporté vers un ailleurs inconnu. Bien qu’elle ne maîtrise ici pas grand-chose, Shade reconnaît cet état. Ils s’écrasent aussi brutalement qu’ils ont été soustraits du labyrinthe.

A l’air libre. Ils sont à l’air libre, au milieu d’une forêt clairsemée formée d’arbres décharnés. Un soleil glacial peine à percer de rares bandes de nuages. Ils se souviennent de tout. Du trou qui a explosé… du Find the path, des boyaux, du combat entre Annabelle, l’hermésophon et Thrékélé, de la cité de Thalirie, de la baronnie de Naos, de leur frère et sœurs. De tout.

Pourtant, ils ont changés. Ils sont revenus en arrière. Jusqu’où ? Le Domaine constant ? Peut-être… Quelle est cette mascarade ! Non loin, deux elfes des bois ou ce qui y ressemble, se querellent avec un personnage translucide aux longs cheveux argentés.

MF-Level 18/17-7