Le Mausolée silencieux sur Nysnmos
Dans un silence oppressant, au milieu d’une brume épaisse nimbée d’une lueur d’un blanc lunaire, une grande arche couronne un étrange monument. Approchons-nous. Nos pas crissent sur le sol gravillonnaire. Il n’y a personne pour nous accueillir ou nous empêcher d’avancer. Nous sommes conscients que nous perturbons une scène ouatée cotonneuse, figée pour l’éternel que même les morts n’osent déranger. Le cœur nous étreint au sein de ce périmètre sacré.
L’arche d’abord. Elle culmine à une vingtaine de mètres de hauteur. Elle représente un serpent qui mord sa queue, s’enveloppant en lui-même dans une quête vaine et futile pour l’éternité. Ses grands yeux ouverts vert citron jurent en comparaison de ses écailles fuligineuses.
Le monument ensuite. Trois marches circulaires mènent à une plateforme en marbre blanc. Jaillissant du centre de cette plateforme, une sculpture singulière en argent se dresse et tente d’atteindre l’arche qui la coiffe. Enlacés et vrillés, un homme et une femme contemplent la tête du serpent, les bras tendus. Leur attitude exprime l’extase doublée de l’attente. Qu’attendent-ils ? Nul ne le sait. Il s’agit de la seule trace matérielle d’Evelyne et Kabale.

Le palais évanescent
Quelque part sur Nysnmos, dans un temps indéterminé, noyé dans une brume épaisse, un domaine éthéré sans limite précise flotte au gré des vagues du doute. Parfois simples vaguelettes, parfois tumultes, le domaine tangue sans jamais sombrer.
Malgré son étendu, le domaine n’est occupé que par deux habitants permanents, un couple, Kabale et Évelyne, inséparable depuis l’aube des mondes connus. Quelques rares voyageurs leurs rendent visite mais nul n’y aboutit par mégarde. Une personne égarée dans les méandres du temps n’aurait rien à y espérer. Ni aide, ni prise pour s’accrocher, ni habitacle pour se reposer car… il n’y a rien ici. Le domaine de l’évanescence n’a pas usurpé son nom.
Alors que peut-on en dire ? Des colonnes de brume autant colossales qu’insubstantielles se dressent, de ci, de là, érigeant un palais à l’architecture baroque. Arcades, ponts, murailles, tours se joignent et se séparent sans harmonie ni symétrie. Il défie les lois de la gravité et de l’espace. L’esprit chavire face à tant d’indécence et d’invraisemblance… La folie guette. D’autant que là où se tenait il y a peu une muraille, un trou béant lui cède la place puis le palais disparaît pour se reconstruire différemment ailleurs à moins que ce ne fut hier ou que ce ne soit demain. Comment l’affirmer ?

Rappel : Kalardhattaia surnomme Shade « l’évanescente », qualificatif que portait jadis Shannotsûul.