Insertion survenue à Fant, retour à la réalité temporelle : ici


… l’ombre gagnait lentement la grande salle. Un caractère inexorable. L’obscurité s’invitait à la fête. Les zones de lumières se rétractaient, avalées par les dendrites noires qui s’amassaient autour d’elles. Les convives attablés se regardèrent l’air inquiet puis vint la peur.

La porte s’ouvrit. Quelqu’un entrait. Une femme peut-être, bien que l’on ne distinguait pas son visage qui avait pour nom la nuit. Elle se déplaçait à pas feutrés, sans bruit, c’est à croire que ses pieds ne touchaient pas le sol.

Je la connaissais très bien. On l’appelait Armanthe, la ténébreuse. Que faisait-elle ici parmi-nous. Je n’imaginais pas Idaûle l’inviter à ces agapes organisées en son honneur. Vraiment pas.

Je n’eus pas le temps de l’arrêter, j’étais pour je ne sais qu’elle raison pétrifiée sur ma chaise. J’entrevis la scène, presque au ralenti et mon cri s’arrêta net dans ma gorge. J’étais incapable d’émettre le moindre son. Pourtant, il ne fallait pas. Pas elle. Surtout pas elle. La seule personne au monde sur laquelle il était interdit de porter la main.

Les convives proches du redoutable combattant furent renversés quand celui-ci jaillit de son siège. Il ne tolérerait pas cette intrusion qui lui faisait ombrage. Cette soirée était la sienne. Il avait bu. Idaûle était connu pour ses accès de rage. Les yeux injectés de sang, ivre de colère, il fondit sur celle qui avait osée s’aventurer en ses terres. Idaûle était dotée d’une vivacité que l’on n’attendait pas chez un personnage si lourd et si massif.

Avant que quiconque ne puisse intervenir, il la saisit et l’emprisonna dans ses bras de fer. Il la broya. La salle était plongée dans un silence de mort. Nous entendîmes les os d’Armanthe craquer. Enfin, après ce qui nous paru une éternité, il desserra son étreinte. Celle qui s’appelait Armanthe n’était plus. Sortant de sa torpeur, il la relâcha. Il nous dévisageait l’air hébété tandis que le corps sans vie s’affaissait à ses pieds, ce corps naguère si beau désormais inutile.

C’est alors que nous entendîmes cette longue plainte stridente qui nous transperça l’âme. Ce cri déchirant qui exprimait un désespoir inimaginable. Témoins de cette douleur, nous nous dévisageâmes épouvantés. Certains se réfugièrent sous la table, d’autres se cachèrent derrière les meubles dissimulant leur visage sous leurs mains, beaucoup préférèrent se défenestrer plutôt que de l’affronter.

Ni moi ni Idaûle n’avions bougés. Il arrivait. Je ne l’avais jamais vu dans cet état. Je savais qu’il ne porterait pas la main sur moi. Quant aux autres… l’ombre…

Insertion 3 Scène Fant