Scène 7 Gax / ArtEclat

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Gax : un futur possible sur le monde d’ArtEclat

Insertion survenue à Gax, retour à la réalité temporelle : ici


La figure fantomatique se tenait fière et droite. Elle suivait les démêlés des captifs dans les gorges en contrebas. Pauvres hères qui couraient éperdument, fuyant l’ire de leurs geôliers, ou tentant d’éviter les diverses chausse-trappes des prisons. La foule en liesse se pressait à ses côtés, insouciante des maux de ceux qui appartenaient il y a peu encore à leur genre. Les coupables reviendraient ensuite parmi eux, une fois leurs fautes expiées, disparus dans une des nombreuses crevasses, déchiquetés par l’un des monstres affamés, à moins que… à moins qu’ils ne finissent broyés par le terrible Baâlor, le gardien des prisons, la créature la plus redoutable d’ArtEclat. En combattant expérimenté, lui qui jadis, faisait partie des plus puissants des mondes, appréciait à sa juste valeur la créature qui se déplaçait à ses pieds. Sans conteste, une des créatures les plus puissantes des Mondes faillés. Car il s’agissait d’un gardien. Lui aussi à l’époque, aurait tenté de l’éviter.

Il contemplait du haut de son promontoire la femme aux cheveux roux qui se mouvait dans ce dédale de roches. Elle brandissait son arme à deux mains tous ses sens en éveils. Un pas de côté, elle s’abaisse, un bond par-dessus une faille, elle se blottit le long de la paroi, écoute. Comment allait-elle s’y prendre pour s’en sortir ? Sans doute, réussirait-elle à éviter la plupart des traquenards des prisons, à pourfendre les différents belligérants, à déjouer les trappes, qu’elles soient magiques, mécaniques voire spectrales qui vous plongeaient dans l’enfer coloré d’ArtEclat afin de grossir les rangs des pâles archétypes du bestiaire féerique dudit monde … sans doute, mais comment se soustrairait-elle à la dangereuse compagnie du gardien ? Elle l’intéressait. Qu’est ce qui l’attirait chez elle ? Dès la première fois qu’il la vit, il savait que son devenir en dépendait. Dès lors, il devait faire quelque chose.

Bien que libre de ses mouvements, le filin éthéré qui le reliait au fou l’empêchait d’évoluer à sa guise. Il était entravé, retenu par une chaîne dont il n’avait jamais pu se défaire, une laisse avec laquelle « le fou », plus rarement « celui qui rampe », le menait là où ses désirs du moment l’entraînaient. La compagnie du second n’était certes pas déplaisante. Quelqu’un de calme, qui se gardait d’exprimer de la haine ou de faire preuve de violence. Son contraire en quelque sorte. Il aimait converser avec ce personnage avec lequel il ne partageait aucunes des vues. Il n’avait pas d’autres choix que de discuter avec lui bien qu’il ne s’était jamais complu dans ce type d’échange. Il préférait de loin l’action aux palabres. Il décelait chez lui une part de compréhension, liée à sa condition, car ils avaient rejoints tous les deux le royaume des ténèbres. Son indicible tristesse l’étonnait pour quelqu’un qui inspirait chez la plupart la terreur. Un seul être lui manquait lui avait-il dit. Quand il évoquait cet être cher disparu, ses yeux caves le fixaient avec une fureur inouïe, sa rancœur morbide exsudait. Puis, sa bienveillance reprenait le dessus.

Il n’avait jamais compris pourquoi le fou l’appelait toujours « celui-qui rampe » et non pas par son nom. Il n’y avait que le fou pour l’appeler ainsi et une personne, une femme, qui venait régulièrement s’entretenir avec eux. Une belle femme sans doute, bien que le concept de beauté lui échappait aujourd’hui. Elle l’avait couvé du regard la première fois qu’elle l’avait vu. Ses yeux flamboyaient. Puis satisfaite, elle s’était détournée. A vrai dire, il n’avait noté aucune hiérarchie entre les trois. Ils étaient égaux. A la longue, il était indéniable que celle qu’ils appelaient Cinielle dirigeait les débats.

La présence du maître d’ArtEclat le hérissait. Souvent, par plaisir, ce dernier attrapait la longe, éclatait d’un rire sonore dont l’écho se propageait par-delà les montagnes, et vagabondait pour une longue déambulation à la rencontre des gens de son royaume. La lueur de la lanterne éclairait leurs pas. Il s’amusait avec sa proie. Aucune bassesse ne lui était épargnée, aucun répit ne lui était accordé car l’elfe était fou à lier. Aussi fou que son pouvoir était grand. Ses sujets l’acclamaient à son passage. Parfois certains d’entre eux l’accompagnaient afin de lui exposer les splendeurs qu’ils avaient façonnées ou celles qu’ils imaginaient pour égayer le peuple des merveilles.

Le spectre emprunta un des ponts qui enjambait les défilés. La vue plongeante était spectaculaire. Les concepteurs des prisons avaient rivalisé d’ingéniosité pour que les spectateurs puissent admirer les déboires de ceux d’en-bas. Et à chaque fois que l’ombre de Baâlor surgissait, la foule frissonnait.

Insertion 7 Scène Gax


Les personnages :

  1. Idaûle, Ligeia, Le fou, Anepthûl, Cinielle